Collaboration avec Alina Mnatsakanian

Projet fascinant de mobilier urbain avec Alina.

Alina investit depuis longtemps la composition à base d'écriture traversée de sa créativité.

http://www.alinamn.com/index.php/creations/sculptural-forms

J'ai l'immense honneur d'envisager avec elle une sculpture parlante, alliant forme et poésie.

Poème tridimensionnel et mouvant, fait pour la vie, tout comme la sculpture d'Alina, sur laquelle on pourra grimper ou se reposer.

 

 

 

 

 

 

 

 

Visite d'une entreprise de St Gall, spécialisée dans la réalisation d'œuvres monumentales.

Dragonfly+poèmes

Poésie harmophonique en collaboration avec Matthieu Amiguet et Barbara Minder des Chemins de traverse

www.lescheminsdetraverse.net

Je suis autrice. Ce qui signifie que j’écris dans divers registres. Romans, nouvelles, poèmes, un polar, chansons, articles scientifiques, scénarii. J’aime la contrainte que m’imposent la vie des personnages historiques, leur époque, leur langage propre. Je me laisse submerger par ces aventures humaines pour les interpréter. Comme un musicien transcende sa partition, je cherche dans chaque anecdote ce qu’elle cache d’universel. Mon art, si l’on veut, mon travail, car c’en est un, ne consiste pas à exprimer, mais à suggérer. Cette exigence prend racine dans l’enfance ; dans mes fringales de lecture. Vous allez rire, c’est une chanson qui constitue mon modèle : « Des yeux qui font baisser les miens, un rire qui se perd sur sa bouche, voilà le portrait sans retouche … ». Je décris mes personnages avec cette économie. Enfant passionnée par la recherche de trésors, j’aime entrouvrir des portes et laisser le lecteur imaginer la suite. Son voyage n’est plus le mien. L’art littéraire, c’est l’effacement. Jeter une graine, laisser croître. Un jour, un photographe m’a commandé des poèmes pour son livre sur le canton de Neuchâtel. Cela m’a pris une année. Ne pas se contenter de ce que l’œil voit. Prendre le temps de vivre dans chacun des décors proposés, le temps de m’évanouir dans leurs replis.

Dragonfly m’a lancé un chalenge bien plus grand encore. Avant de vous raconter mon aventure, je tiens ici à remercier Barbara et Matthieu de la confiance qu’ils m’ont offerte. On ne touche pas impunément à une œuvre. Les mots emprisonnés dans leur carcan de significations peuvent devenir aussi inconvenants que des déchets plastiques à la surface de la mer. J’ai pensé utiliser l’illusion des sens. On peut, avec les mots, affoler l’entendement. C’est la poésie. Elle s’évertue à briser la pensée rationnelle pour inviter à d’autres mondes. Mais à trop chercher l’ivresse, on se perd. La musique de Barbara et Matthieu offrait déjà cette frénésie.

Je veux les remercier de leur confiance car il y avait maintes manières de gâcher leur œuvre. Par le trop plein, par le trop trivial, par l’incongruité. J’en frémis au moment de l’écrire. Je ne voulais pas incruster mon histoire dans la leur. Créer un être hybride, un Frankenstein hérissé de vis et de boulons. Parasiter, faire mon nid dans leurs entrailles. Oh ! que d’affreuses images.

Ne rien ajouter. Voici ma contrainte. Sacré défi ! Pour autant il fallait assumer sa place. La prendre, pleinement. Ne pas rester en retrait, ne pas s’excuser d’être là. Il fallait faire partie du tout. Ne rien ajouter, sauf de la profondeur. Elle seule pouvait permettre à cette alliance de fonctionner. J’ai puisé au fond de mon âme, dans l’intimité de mon ventre, car je suis humaine, après tout. Mais il fallait aussi, pour ouvrir les perspectives, glaner sur les rivages de la nature divine.

Dragonfly, l’illusion des sens, une œuvre qui parle par elle-même et déjà emporte l’auditeur dans ses flux. Ne rien ajouter, donner juste un coup de rame de temps en temps pour orienter la course de l’esquif. « Semence ». Arrêter le temps, peut-être. Se perdre dans les diamants de l’eau. Rencontrer la libellule. Ecouter ce qu’elle raconte du commencement des mondes. Arrêter le temps, oui ! pour discerner le battement de ses ailes, pour entendre ce qu’elles chuchotent au-dessus des eaux. Puis se laisser à nouveau emporter par le courant, broyer par les vagues tumultueuses « que l’on exècre quand elles se creusent, car alors les mondes se mélangent et on ne sait plus où est le haut et où est la bas ». Rencontrer Dieu et sa parole vivante alors que, submergée, je suis contrainte au silence. Privée de souffle, je reçois le sien. « Qui donnerait que je sache où le, la trouver ? ». Rescapée, je dérive à l’ombre verte de sa cathédrale, je m’abandonne. Un chant s’impose, les piliers antiques se dressent paisibles, ils se reflètent sur l’eau matricielle. Une enfant pousse au-dedans de moi. Une graine qui lentement mûrit et se détache. « Vol, vole, la graine, le grain, le sens, au gré, au gré des vents ». Je disparais.